Le projet controversé du gouvernement britannique de transférer des demandeurs d’asile au Rwanda a été central dans la réponse du Royaume-Uni à l’augmentation des traversées de la Manche en petits bateaux. Cependant, si le parti conservateur perd les élections générales début juillet, le plan pourrait être abandonné.
Cette politique a été entravée par diverses contestations judiciaires et politiques.
Le parti travailliste, pressenti pour remporter les élections et former le prochain gouvernement, a annoncé qu’il abandonnerait le plan rwandais et réaffecterait les fonds pour créer un nouveau commandement de sécurité des frontières, ciblant les gangs criminels derrière les traversées de la Manche.
L’objectif du plan rwandais était de dissuader les migrants de traverser illégalement vers le Royaume-Uni en sachant qu’ils seraient envoyés au Rwanda pour traitement. Mais ce plan était irréalisable dès le départ et semblait avoir un effet plus symbolique qu’autre chose. Certains pourraient dire que le gouvernement n’a jamais eu l’intention de le mettre en œuvre, mais voulait simplement dissuader les migrants par une couverture médiatique.
Le Rwanda est satisfait de cet accord pour des raisons financières. Le National Audit Office a estimé que le Royaume-Uni versera 370 millions de livres sterling (environ 430 millions d’euros) sur cinq ans. À cela s’ajoutent 20 000 livres sterling (environ 23 000 euros) par personne, et 120 millions de livres sterling (environ 140 millions d’euros) une fois les 300 premières personnes relocalisées. De plus, les frais de traitement et de fonctionnement pourraient atteindre 175 000 euros par personne relocalisée.
Rejet
La Cour européenne des droits de l’homme a été la première à bloquer un vol vers le Rwanda en juin 2022. Cette décision d’urgence a été prise alors que plusieurs recours avaient été déposés contre le plan britannique. Ensuite, la Cour suprême britannique a confirmé le 15 novembre l’illégalité du projet d’expulser des demandeurs d’asile vers le Rwanda. Le 23 janvier, la Chambre des Lords a voté pour retarder le traité permettant ce plan d’expulsion. Ce traité et le projet de loi qui l’accompagne sont les piliers de la tentative du Premier ministre Rishi Sunak de contourner le blocage des déportations par la Cour suprême.
Rôle indirect de la RDC
Les tensions croissantes entre la RDC et le Rwanda, dues aux affrontements entre les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda et l’armée congolaise, ont déplacé des dizaines de milliers de personnes à l’est du Congo, ternissant l’image du régime rwandais. Les menaces du président congolais Félix Tshisekedi d’engager une guerre directe avec le Rwanda ont aggravé cette perception, rendant difficile l’envoi de migrants dans un pays jugé instable et envahisseur.
Le M23 piétine
Depuis le départ des troupes est-africaines dirigées par le Kenya et l’arrivée des forces de la SAMIDRC pilotées par l’Afrique du Sud, la rébellion du M23 soutenue par le Rwanda n’avance plus à l’est de la RDC. Les reconquêtes de l’armée congolaise sont plus fréquentes.
Acculé et condamné par ses protecteurs occidentaux, Kagame a perdu son calme légendaire. La diplomatie de Félix Tshisekedi semble porter ses fruits. Dans une récente interview accordée à France 24, Kagame a affirmé être prêt à engager une bataille directe avec la RDC, tout en acceptant de négocier la crise congolaise malgré son déni de tout soutien au M23.
Roger Lazio