La République Démocratique du Congo (RDC) se trouve au cœur d’un dilemme complexe, confrontée à des grandes puissances qui, malgré leurs discours de soutien à la démocratie et au développement, poursuivent des intérêts souvent contradictoires et préjudiciables pour la nation. Parmi ces acteurs majeurs figurent les États-Unis, la France, ainsi que l’union européenne, qui ont tous une influence considérable sur la région des Grands Lacs.
Victime des intérêts géopolitiques. Attachés à leurs intérêts et positionnement stratégiques, ces acteurs jouent un double jeu au détriment de la souveraineté et la stabilité de la RDC. Les États-Unis par exemple s’engagent activement dans la situation actuelle, mais pas forcément dans le sens des aspirations du peuple congolais. Après avoir exercé une influence sur l’Angola pour qu’il ne prenne pas part à l’intervention militaire de la SADC (Afrique du Sud, Malawi et Tanzanie) en faveur de la RDC, ils exercent désormais des pressions sur cette organisation régionale afin qu’elle ne soutienne pas directement la RDC face aux groupes armés qui menacent sa sécurité et son intégrité territoriale.
Récemment, une conversation entre Molly Phee, Secrétaire adjointe au Bureau des affaires africaines des États-Unis, et le Secrétaire exécutif de la SADC visait à inciter la SADC à encourager la RDC au dialogue plutôt qu’à un soutien direct, alors que le dialogue a déjà été tenté à maintes reprises sans succès.
Parallèlement, les États-Unis cherchent à persuader le Burundi de mettre fin à ses actions militaires en appui au Rwanda, leur allié stratégique dans la région, qui est accusé de soutenir le M23, un mouvement rebelle qui sème la terreur dans l’est de la RDC. Dans un contexte où les FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) et la SADC ont commencé à bombarder Mweso, un bastion du M23, le Royaume-Uni a récemment exprimé sa condamnation, mais reste silencieux face à l’avancée des forces du M23 vers Goma, la capitale du Nord-Kivu.
Il y a quelques jours, la France, au cours d’une “table ronde – commission des Affaires étrangères”, a consacré plus de deux heures à condamner la RDC, sans mentionner le rôle du Rwanda, justifiant cette omission par la volonté d’éviter d’attiser les tensions, alors que le Rwanda est largement reconnu comme le principal instigateur de la crise. Malgré les tentatives de Blinken, le secrétaire d’État américain, par le biais de l’Angola, visant à inciter le Président Felix Tshisekedi au dialogue avec les groupes armés, le Président a catégoriquement refusé, affirmant qu’il n’y a pas de place pour le dialogue avec ceux qui tuent, violent et pillent les ressources du pays. Cependant, des signaux émergent, notamment avec l’installation de la société américaine BYD (Build Your Dreams), un géant des véhicules électriques, au Rwanda.
Parallèlement, le partenariat Australie-Rwanda sur le coltan, un minerai stratégique utilisé dans les technologies de pointe, souligne les motivations du Rwanda à s’emparer de la mine de Mwangachuchu, située en territoire congolais. De plus, l’UE vient de débloquer plus de 900 millions d’euros en faveur du Rwanda pour soutenir son industrie et ses mines, ce qui renforce la capacité du Rwanda à financer ses ingérences dans la RDC.
Des spéculations suggèrent que les États-Unis pourraient adopter la même rhétorique que le Rwanda, mettant en avant des motifs tels que le génocide des Tutsi et la présence des FDLR (Forces Démocratiques de Libération du Rwanda), un groupe armé composé de Hutu rwandais, pour justifier leur ingérence dans les affaires internes de la RDC.
Actuellement, les États-Unis s’opposent aux projets pétroliers, gaziers et du grand INGA, le plus grand barrage hydroélectrique du monde, qui pourrait fournir de l’électricité à toute l’Afrique. Leur mission semble claire : maintenir la situation actuelle pour protéger leurs intérêts, quitte à sacrifier le peuple congolais.
Face à ce défi diplomatique complexe, où les grandes puissances internationales semblent jouer un double jeu, affichant des intentions louables tout en poursuivant des intérêts souvent contradictoires et préjudiciables pour la RDC, cette situation soulève une question cruciale : Comment la RDC peut-elle naviguer dans ces eaux troubles tout en préservant sa souveraineté et en garantissant son développement?
La RDC doit adopter une stratégie qui lui permette de contourner les pièges tendus par ces grandes puissances, tout en tirant parti des opportunités qu’elles offrent. Cette stratégie repose sur trois principes fondamentaux :
Vigilance : Décoder les Intentions Cachées
La première étape cruciale pour la RDC est d’adopter une posture de vigilance. Face aux grandes puissances qui promeuvent des discours de soutien, la RDC doit analyser attentivement leurs actions réelles. Il est essentiel de ne pas se laisser influencer par des promesses en apparence généreuses, mais de juger ces acteurs sur la base de leurs réalisations concrètes.
La vigilance comme première pierre angulaire de la stratégie congolaise, consistera à être attentif aux actions et intentions des grandes puissances. Il s’agit de dénoncer les ingérences et contradictions, de résister aux pressions et manipulations. La vigilance demande de ne pas se laisser séduire par les discours ou les promesses, mais d’évaluer les grandes puissances sur leurs actes et résultats. Elle exige également l’unité et la solidarité nationale face aux tentatives de division.
Diversification : Élargir les Horizons Diplomatiques
La diversification, deuxième pilier de la stratégie, vise à réduire la dépendance envers une poignée de grandes puissances. Il s’agit de multiplier les partenaires, sources de financement, coopération, et investissement. La diversification appelle à chercher des partenaires partageant les valeurs et les objectifs de la RDC, respectant sa souveraineté et apportant une valeur ajoutée à son développement. Elle nécessite le renforcement des capacités nationales, la valorisation des ressources locales, et la promotion de l’innovation et de l’entrepreneuriat.
Négociation : Dialoguer sur un Pied d’Égalité
La négociation, comme troisième élément stratégique, consistera à ne pas subir ou accepter les conditions imposées, mais à dialoguer et échanger sur un pied d’égalité. Cela exige une défense ferme des intérêts nationaux, une mise en avant des atouts du pays, et une flexibilité stratégique pour parvenir à des accords équilibrés et de rechercher des solutions gagnant-gagnant.
Elle exige également une diplomatie solide, une communication efficace, la mobilisation d’acteurs nationaux et internationaux, et la construction d’alliances et de réseaux.
Conclusion : Vers une Diplomatie Éclairée
Naviguer dans le labyrinthe diplomatique exige une approche stratégique et éclairée. Les décideurs congolais, en particulier le Président de la République, doivent adopter une stratégie basée sur la vigilance, la diversification, et la négociation pour préserver les intérêts nationaux tout en promouvant le développement durable. En contournant les pièges du double jeu des grandes puissances, la RDC peut construire un avenir plus résilient et prospère pour sa population.
Tribune Sims Nono Simabatu Mayele
Biographie de l’auteur
Sims Nono Simabatu Mayele est , expert et chercheur en désarmement et contrôle des armements, Ancien Boursier au programme d’études, de formation et de services consultatifs des Nations Unies en matière de désarmement et ancien élève du Centre de politique de sécurité de Genève (GCSP).
Il travaille actuellement comme Directeur exécutif du Centre de Recherche et d’Information pour le Désarmement et la Sécurité (CRIDS). Son travail consiste à mettre en œuvre la direction stratégique et de donner des orientations pour atteindre les objectifs de l’organisation.
Au cours de sa carrière (entre 2011 et 2018), il a travaillé comme membre de l’Autorité Nationale et responsable en charge de la mise en œuvre de la Convention sur l’Interdiction des Armes Chimiques (CIAC/RDC) pour le compte du Ministère des Affaires Étrangères et comme expert sur les questions liées au Désarmement et Sécurité Internationale au Ministère de l’Intérieur, Sécurité et Décentralisation pour le compte du Comité National du Désarmement et sécurité internationale.
Il est détenteur d’une licence en Relations Internationales, option politique Internationale (Université de Kinshasa) et d’un Master en Science Politique, orientation Relations Internationales, spécialité paix et sécurité (Université Libre de Bruxelles).
Diplômé aussi en Droit international du désarmement et la mise en œuvre du Traité sur le commerce des armes au Centre de Politique de Sécurité de Genève (GCSP). Sims Mayele est auteur de publication de plusieurs articles sur la thématique désarmement et contrôle des armements. Il a également participé à plusieurs conférences de haut niveaux, séminaires et formations sur le plan international dans le domaine de la diplomatie, désarmement, maîtrise des armements, paix et sécurité et collabore avec plusieurs organisations internationales dans ce domaine.
Les impérialistes ne laisseront jamais les Congo libre aussi longtemps que nous-même nous ne prenons pas à charge nous allons toujours continuer à pleurnicher comme des gamins et ils vont continuer avec leurs jeux de se cacher derrière ce voyou de Kagame prenons-nous à charge peuple congolais, une très belle réflexion courage à vous mon frère
Le plus important est là sensibilisation sur ces thématiques pour une large diffusion, je penses qu’il faut aller au cœur du problème c’est à dire constituer un lobbying puissant qui consistera à toucher les peuples respectifs ( de ces grandes puissances) sur la politique à double jeu et leur participation indirecte à ces affres à l’est de la RDC