Le Rwanda et le Burundi se battent sur le sol congolais. C’est un secret de polichinelle. « Des mouvements de militaires burundais lourdement armés de part et d’autre de la frontière entre la République démocratique du Congo et le Burundi sont régulièrement signalés. », estime un habitant du côté de la RDC.
Le 25 février 2024, le groupe armé Tabara Rouge a lancé une attaque meurtrière à Buringa, située dans la commune Gihanga de la province Bubanza, à l’ouest du Burundi. Cet incident a ravivé des tensions de longue date entre le Burundi et le Rwanda, le Burundi accusant le Rwanda de soutenir les assaillants depuis la République démocratique du Congo .
Le gouvernement burundais a fait état de neuf morts, dont six femmes et un soldat, et cinq autres blessés. Red Tabara a revendiqué l’attaque, affirmant qu’elle visait deux avant-postes militaires et avait entraîné la mort de six militaires et la destruction d’un siège du parti CNDD-FDD.
Le Burundi et la RDC ont signé un accord bilatéral permettant aux forces burundaises d’intervenir au Congo. Entre septembre 2023 et janvier 2024, plusieurs militaires burundais dont des officiers supérieurs ont été tués dans la province du Nord-Kivu à l’est de la RDC.
Le 29 décembre 2023 lors d’une émission publique, le président Évariste Ndayishimiye a annoncé depuis la province de Cankuzo à l’est du pays que « c’est normal que les militaires burundais soient tués sur le territoire congolais ».
« Le Burundi est en train d’aider pour combattre et éradiquer le terrorisme, nous sommes en Somalie, en Centrafrique….Comme vous le savez, la RDC est déstabilisée par plusieurs groupes armés. Il y a des accords de défense mutuelle. Si vous n’aidez pas votre voisin à éteindre le feu quand sa maison brûle, demain si c’est votre tour, il ne viendra pas vous aider. Si le Burundi va secourir la RDC, il se défend lui-même car une bonne guerre, tu la mènes avant de la mener. La guerre, c’est un jeu de la mort. Si tu renies ça, tu n’es plus militaire. Un militaire doit se mettre en tête qu’il doit mourir pour sa nation. Ça c’est très normal. Tu dois te sacrifier [….]. Nous, les militaires nous avons signé pour ça, le contraire revient à pécher contre sa déontologie », a-t-il dit.
Et de continuer sur un ton très sévère en répondant à une question d’un journaliste local relative aux emprisonnements des militaires qui refusent d’aller combattre aux côtés des FARDC.
« L’armée a son propre règlement , il y a un militaire que tu envoies par exemple monter la garde mais préfère aller boire de la bière, il doit être puni car l’armée a un règlement. Si vous êtes en mission, les indisciplinés sont ramenés à l’ordre…Que ce soit au Congo, en Centrafrique ou en Somalie, partout ils sont punis…les Burundais aiment les rumeurs, laissez les forces de sécurité garder leur secret professionnel, si les civils s’en mêlent, demain nous n’aurons plus des gens pour sécuriser et protéger notre pays. Ne vous mêlez plus de ça ».
Enterrement du major Ernest Gashirahamwe, le premier haut gradé de la FDNB à avoir été tué dans le Nord-Kivu, le 16 novembre 2023 à Bujumbura
Pour le journaliste senior burundais Athanase Karayenga basé en France et ancien officier de l’armée burundaise qui a fait des études à l’académie militaire du Caire en Égypte, les militaires burundais ont le droit de refuser de mauvais ordres.
« Les militaires burundais ont signé pour défendre les citoyens burundais, pour protéger les frontières du Burundi, mais pas pour combattre comme mercenaires au service d’une puissance étrangère et sous l’uniforme d’une armée étrangère. Les militaires burundais ont le droit de refuser de mauvais ordres. Partout ailleurs on les appelle des objecteurs de conscience. Je comprends donc tout à fait le désarroi et la révolte de plusieurs militaires burundais envoyés comme mercenaires pour combattre le M23. Ils s’exposent au danger suprême, à la mort », explique Athanase Karayenga.
Pour des militaires qui meurent en mission de maintien de la paix en Somalie par exemple, la famille reçoit l’équivalent de la moitié de 100 mille dollars en francs burundais sur le taux officiel au moment où l’autre moitié est versée au gouvernement burundais. Pour les victimes de la guerre en RDC, la situation reste confuse.
Avec Coco Kabwika