Projection cartographique de l’élection du 20 décembre en RDC : Felix Tshisekedi en tête des favoris

Le Président sortant Félix Tshisekedi est bien parti pour remporter haut la main l’élection présidentielle du 20 décembre 2023 en République démocratique du Congo. En effet, il a pris une longueur d’avance sur ses opposants grâce à une préparation minutieuse de sa réélection. Il a noué des alliances avec des leaders locaux qui ont une base solide, ce qui lui assure un soutien important dans plusieurs provinces.

En analysant la cartographie électorale sur la base des scrutins passés en 2006, 2011 et 2018, on constate une nette amélioration de l’opinion publique en faveur du candidat Félix Tshisekedi. La partie Ouest du pays, notamment Kinshasa, considérée comme un fief de l’opposition, a vu une évolution favorable pour le Président sortant. En effet, en 2006, Jean-Pierre Bemba était arrivé en tête face à l’ancien président Joseph Kabila. Cette tendance s’est répétée lors des scrutins de 2011, avec une large victoire d’Etienne Tshisekedi face à Joseph Kabila.

En 2018, pour la première fois, un président sortant limité par la constitution ne se représentait plus. Cette élection a vu la victoire du candidat commun de l’opposition Martin Fayulu, vainqueur devant Tshisekedi, autre candidat de l’opposition. Cependant, depuis sa défaite en 2018, Felix Tshisekedi a amélioré son image dans la capitale grâce à différentes réalisations visibles et des jeux d’alliance avec des leaders locaux au sein de la coalition « union sacrée ».

Le candidat qui se considère comme le vrai vainqueur du scrutin de 2018, Martin Fayulu, est en perte de vitesse dans la capitale congolaise. Ses jeux d’alliance avec plusieurs acteurs politiques dont Joseph Kabila, la dislocation de Lamuka, son boycott du scrutin législatif et son divorce avec Adolphe Muzitu sont à l’origine de sa chute de popularité.

Moïse Katumbi est plus populaire à l’Est qu’à l’Ouest et ne sortira pas vainqueur dans la capitale congolaise ni dans d’autres provinces de l’Ouest. Son meilleur score sera une troisième place.

Ne bénéficiant plus de l’appui des grands leaders issus de l’accord de Genève, Martin Fayulu va être contraint de partager des voix du grand Bandundu avec Adolphe Muzitu, un outsider sérieux ayant une bonne base dans l’ex Bandundu.

Le Kongo Central semble acquis au président sortant Félix Tshisekedi, au vu des réalisations importantes qu’il y a effectuées dont un soutien massif de l’Eglise Kimbanguiste.

Martin Fayulu perd probablement aussi le grand Equateur ainsi qu’une partie du Maï-Ndombe, fief de plusieurs leaders dont Jean-Pierre Bemba, Jean Lucien Mbusa, Jean Pierre Lihau, Willy Bakonga, la famille Mobutu…, des alliés à Felix Tshisekedi.

Largement soutenu dans la partie Est de la RDC, Martin Fayulu ne pourra bénéficier que des quelques voix nostalgiques de ses anciens électeurs de la Province Orientale, Nord-Kivu et d’une partie du Katanga. Le report des voix n’étant pas automatique, il ne pourra cependant compter sur quelque voix.

Fort de son soutien avec des leaders locaux dans la grande province Orientale, Felix Tshisekedi pourra y sortir deuxième derrière Moïse Katumbi et sortir carrément premier dans le Nord-Kivu bénéficiant du soutien des leaders Nande, ethnie majoritaire dans la province qui lui étaient hostiles en 2018 : Mbusa Nyamisi, Julien Paluku et Mohindo Nzangi tous ministres. Moïse Katumbi sera probablement deuxième et sera talonné par Martin Fayulu et Denis Mukwege.

Le docteur Mukwege, leader naturel du Sud-Kivu, hésitant à poser sa candidature manque d’encrage dans le monde politique et populaire de la RDC. Ses sorties publiques dans la partie Ouest du pays ont été un grand échec. Incapable même de drainer des foules dans son premier meeting populaire à Bukavu, il est largement dépassé par Félix Tshisekedi qui y jouit du soutien de Vital Kamerhe, Modeste Bahati et des Nyakeru sa belle-famille. Virtuellement premier devant Katumbi qui aura du mal à battre le président sortant même en alliance avec Mukwege.

La Province du Maniema est largement acquise à Moïse Katumbi grâce à son alliance avec Augustin Matata, un leader modeste. Il bénéficie également d’un soutien tacite des anciens cadres du PPRD majoritaire dans la province dont Emmanuel Shadary. Katumbi sera vainqueur devant Felix Tshisekedi.

Depuis 2006, le grand Katanga a toujours été divisé entre l’UDPS et le PPRD de Joseph Kabila. En 2006, Jean-Pierre Bemba avait bénéficié du soutien de l’UDPS qui est arrivée second en 2011 et en 2018. Moïse Katumbi en sortira vainqueur avec un score serré. Cependant, l’absence d’une grande coalition d’une opposition unie derrière un seul candidat fait le jeu du pouvoir qui bénéficie du soutien de Jean-Pierre Bemba, Mbusa Nyamwisi et son ancien allié Vital Kamerhe.

 Transposition de la carte de 2006

 

 

En transposant cette carte électorale de 2006 ayant consacré la victoire de Joseph Kabila sur Jean – Pierre Bemba au premier tour, nous constatons que Félix Tshisekedi hérite de la position de Jean – Pierre Bemba en bleu, et que le grand Bandundu ne va pas basculer à l’Est comme 2006 grâce à l’apport de Gizenga au contraire on va assister à l’émiettement des voix, où il pourra être en ballotage.

Moïse Katumbi ne va bénéficier totalement des anciennes bases de l’ancien président Joseph Kabila en jaune, pour la simple raison qu’il lui échapperai deux grandes provinces jadis acquis à Joseph le Nord – Kivu des Mbusa et consorts et le Sud – Kivu de Vital Kamerhe tandis que son challenger numéro 1, Félix Tshisekedi va lui arracher quelques points dans le grand Katanga, la province orientale et le Maniema.

L’implosion des leaders de Genève, l’unité du bloc de Nairobi et certaines réalisations de Félix Tshisekedi feront de lui le vainqueur des élections du 20 décembre 2023, suivi sûrement de Martin Fayulu et de Moïse Katumbi.

Roger Lazio

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